Abandonner l’ombre pour la proie

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Abandonner l’ombre pour la proie, le nom pour le visage et reconnaître dans les tâtonnements de l’élève, sa lassitude, ses joies, ses tourments, ses égarements, un monde qui se lève. En tenant résolument à distance l’empathie nue, si mauvaise conseillère, qui conduit le maître à parasiter le territoire de son élève en lui faisant croire qu’il lui est un peu redevable de ce qui lui arrive.
Si le maître est indispensable, ce n’est pas en ce sens, pas non plus parce qu’il en saurait plus sur le monde, c’est parce que l’élève a besoin que quelqu’un demeure inaccessible en occupant la place de l’autre ; et pour qu’il parvienne à y rester sans faillir, le maître doit prendre conscience, enfin, qu'il est le principal obstacle à l’apprentissage de son protégé, et le rester aussi longtemps que celui-ci n’a pas jeté son dévolu sur d’autres horizons.
L’école n’est pas, d’abord, une machine à transmettre des connaissances, ni un laboratoire à produire des grimaces, des rires et des pleurs, ou une fabrique à mauvais souvenirs dans laquelle l'enfant apprendrait, comme c’est si souvent le cas, à s'endurcir et à faire bande à part, mais un abri où il s’essaie à devenir un parmi les autres dans un monde en partage. La connaissance suit.

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Jean Prod’hom