Souvent le monde font couver les oeufs de cane ...

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Sinon, ces canes-là, noires à tête blanche, sont capables pour élever des canets. Souvent le monde font couver les oeufs de cane par une poule parce que la poule est bonne meneuse, qu’on dit. Oui, mais elle se trouve embêtée tout de même quand les petits canets se mettent à nager sur la mare et qu’elle reste à marcher au bord.
Jean-Loup Trassard, L’Homme des haies, Gallimard, Paris, 2012

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C’est un livre d’histoires pour les vivants qui raconte l’arrivée du tracteur dans nos régions autour des années 50, dit au plus près et dans la langue de la Mayenne – on n’y parleront pas le latin de Paris – ce qu’on pouvait voir et vivre de chaque côté de cet événement, innombrables histoires qui s’achèvent aujourd’hui avec la mort de ceux qui auront vécu tout près des basses-cours avec tout autour de la cour les bâtiments de la ferme.
Jean-Loup Trassard écoute Vincent Loiseau, il se souvient de ce qui l’a occupé sa vie durant et qu’il a décidé de garder vivant jusqu’à la fin. L’homme se tourne dans son lit aujourd’hui comme autrefois lorsque Quadrille, sa jument de tête devenue brave limonière tombe malade. Elle ne mange plus, se tient à peine debout. Le vétérinaire l’ausculte avant de déclarer : « C’est fini. Faut l’emballer. Pas la peine de faire des frais. » Vincent aurait préféré la garder elle aussi jusqu’à la fin, mais ça aurait coûté trop cher. Alors au dernier matin, il va la brosser, la peigner, lui caresser la tête. « … et puis je suis allé laver le peigne, l’étrille et la brosse à la pompe, enveloppés dans un bout de journal, je les ai mis dans le bas de mon armoire et je suis parti barbeyer. »
C’est sur les talus et au pied des haies que Vincent s’assied, l’homme est usé, il reprend à voix basse les travaux que ses ancêtres ont commencé, utilise une dernière fois les outils du domaine de La Hourdais avant de les emballer dans un bout de journal, dans une langue singulière qui fait entendre ce que furent les rapports de l’homme et la terre.

Jean Prod’hom