Les filles



Les filles passent la fin de la matinée à ranger leur chambre, moi à mettre la main sur une émission d'Arte autour de Naples, Naples, ville ouverte, qui raconte comment la Camorra a repris pied dans la ville après la capitulation. Sans succès. Que de temps perdu avec ces machines, et d'espoirs déçus.
Descends au village par la Molleyre, tourmenté par rien, tourmenté peut-être de ne l'être pas. Le marbre blanc qui trône dans l'allée qui traverse le jardin du Château ne me raccomode pas avec l'art, des primevères fanent. Remonte derrière la laiterie, le colza fait ses premières fleurs, dans le ciel planent des buses et passe un piper. Je traîne depuis le matin une mauvaise humeur, un rien me fâche. Je ne suis pas le seul, deux jeunes adultes grognent sur la route des Chênes contre leur mère – ou belle-mère – qui peine, les deux mains accrochée à son déambulateur, leurs deux chiens aboient et montrent les dents.
Deux taches rouge avancent dans le pâturage en contrebas du chemin des Tailles, à la hauteur de l'arbre où un jeune paysan, il y a peu, s'est ôté la vie, ce ne sont pas des morilles – j'y songe un instant  – mais de la dent-de-lion qu'ils ramassent.
Rien n'y fait, impossible de me débarrasser de mon humeur, je sais pourtant, et l'attends, qu'il suffira d'une ouverture dans le fouillis des mots sans queue ni tête qui gravitent aurour de ce qui me reste de raison pour que tout s'éclaire, au moins un instant, un instant qui suffira à me remettre d'aplomb.
Je rencontre Mirko à la Moille-au-Blanc. Plus de 40 ans qu'on ne s'était pas revus, une femme et deux enfants, il habite à la Mellette depuis près de 10 ans. Yves nous rejoint à 17 heures. Il nous parle de Tonwnbly et de ce qui le préoccupe, de la mémoire. On va faire le petit tour.

Jean