Laïus, topo et cliché

Le grand destin du petit bout de papier

Un papier orphelin, de mère sapin et de père… abattu comme lui. Ecorcé, coupé en vulgaires copeaux toujours plus petits puis compressés. Mais cela n’est pas fini. Il y a encore le découpage et le triage puis le classement ou empilement, ensuite le transport et le désempilement. On le chiffonne, le déchire, le tache, l’étouffe et enfin le laisse à la merci des frimas. Et voilà, mon histoire en accéléré. Je suis comme une coquille de noix dans un océan, perdue et abandonnée.
Les gens me frappent quand ils ne m’ignorent pas. Ils me méprisent ou se jouent de moi...
Un jour, un souffle de vent m’emporta et j’allai m’écraser contre un champ d’épines vertes. D’un seul coup, le souffle cessa et je m’immobilisai sur ce véritable tapis clouté. De là, j’ai une position privilégiée pour surprendre le quotidien de mes bourreaux: les humains. Tôt le matin, ils sont presque tous pareils: plus ou moins tristes, fatigués et pressés à la fois. Durant la matinée, Il n’y a personne tout est calme; ils doivent tous être enfermés dans ces grosses boites à l’intérieur desquelles j’ai passé une petite partie de ma vie. Puis, vers la fin de l’après-midi, mes bourreaux semblent avoir été relâchés; ils reviennent me chercher noise. C’est l’heure des vols planés et des atterrissages ratés, des longues randonnées et des voyages en bateau, du dépaysement et de l’aventure.
Hélas, commençant à prendre plaisir à la vie, celle-ci se compliquera; en effet, j’attraperai des maladies (refroidissements, rhumatismes) et je mourrai. Puis, le petit bout de papier se fera parasiter par des champignons et petit à petit se décomposera. Un vieux reste où se cachent plein d’insectes, un papier fini.

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Dimitri

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