Peut-on illuminer un ciel bourbeux et noir ?

On rêva enfin
d'un monde où
il n'y eût rien à ajouter
ni avant ni après
dès l’aube
on se penchait
sur les termitières
avec les yeux fixes 
des rois et des reines
on cueillait
dans le ciel
les signes des hirondelles
et les bois sur la grève
on envoyait des colonnes
pour explorer 
la mémoire de l'océan
on descendit 
au fond des puits
là où sommeillent 
le souvenir des armes 
l'or et les légendes 
dont on tira une pile
de fragments couleur d’os
ligaturés par le silence
valeureuse têtes 
jamais revues
je l'ai dit 
il eût mieux valu
rester dans le rang
ne rien écrire
ne rien chercher
ne rien comprendre 
laisser ce ramassis 
de mots rances 
croupir dans une langue estropiée
nous livrer 
sans délai
à l'inestimable
au mot rivage 
au mot galet
à la miraculeuse aurore
Jean Prod’hom
