Deux minutes

Si je n’étais pas partie deux minutes trop tard de chez moi cet après-midi, je n’aurais pas loupé le bus. Comme prévu, je serais descendue à Bel-air, je me serais rendue au super marché et j’y aurais fait mes achats. Ensuite je serais rentrée chez moi et, comme prévu, j’aurais préparé le souper. Une journée banale.

Mais tout cela n’est jamais arrivé, j’étais montée dans le bus suivant. Arrivée à Bel-air, j’allais appuyer sur le bouton et me lever pour descendre du bus mais il est arrivé. Il avait un sourire si amical. Des yeux si brillants, si bleus. Il s’est approché et s’est assis à côté de moi. Nous avons commencé à parler, de choses et d’autres, de tout et de rien. Au fur et à mesure de notre conversation, nous avons fait connaissance. Plus on parlait, plus je l’appréciais. Il faisait déjà presque nuit lorsque nous avons remarqué que nous avions tout les deux loupé notre arrêt. Il m’a prise par la main et nous sommes sortis du bus. Nous nous sommes promenés pendant des heures, plus on parlait, mieux on s’entendait. Au bout d’un moment j’ai eu froid, il m’a prêté sa veste et nous avons repris le bus. Je commençais à l’aimer. Quand une voix féminine a annoncé dans les hauts-parleurs  « Prochain arrêt, Bellevaux», j’ai ressenti une grande tristesse. Je savais que cette fois je devais descendre et rentrer chez moi. Je pense que si j’avais pu, je serais restée toute la nuit auprès de lui. Avant de se quitter, il m’a glissé un billet dans la poche. On s’est échangé un dernier regard et les portes du bus se sont refermées. En rentrant chez moi, j’ai sorti et déplié le petit billet de ma poche.

Ce jour-là, j’avais sans doute fait la plus belle rencontre de ma vie, et tout ça parce que j’étais partie en retard de chez moi. Ces deux petites minutes avaient changé une journée banale en une journée merveilleuse.

Lara